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Planter des graines dans les quartiers populaires

Ce travail est le résultat d’un stage de Master 2 « Sociologie parcours Villes et nouvelles questions sociales » de l’Université de Lille. Au cours de ce stage, Marin Minard a collaboré pendant six mois avec l’Institut de formation et de recherche en éducation à l’environnement (Ifrée). Ce stage a fait l’objet d’un co-encadrement par l’IFREE et la Chaire Participations, Médiation, Transition citoyenne de La Rochelle Université.

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Contexte du stage

En 2022, l’Ifrée a reçu le soutien de l’Office Français de la Biodiversité pour explorer des leviers de mobilisation des habitants en quartiers prioritaires de la Politique de la Ville (QPV) autour des enjeux de biodiversité.
L’Ifrée a constitué en mai 2022 un groupe de praticien·nes pour expérimenter ensemble des manières d’aborder la biodiversité et ses enjeux avec des publics de quartiers prioritaires de la Politique de la Ville (QPV). Il s’agit de concevoir et expérimenter des démarches pour « mettre en oeuvre des projets liés à la nature et la qualité de vie dans les quartiers Politique de la Ville ».
Ce groupe de 9 professionnel·les de terrain comprend des animateur·rices de quartiers et des éducateur·rices à l’environnement issus de 5 villes de Nouvelle Aquitaine. L’Ifrée les accompagne dans le cadre d’une formation-action pour croiser leurs compétences et expérimenter des démarches. L’objectif du dispositif est, à l’issue de l’année 2023, de dégager des points de repères méthodologiques sur des manières d’aborder ces questions avec des publics en QPV.
Le stage proposé vise à répondre à un ensemble de questionnements de l’organisme:
  • Quels liens font sens pour ces publics entre leurs préoccupations et la présence de nature ?
  • Comment faire émerger ces liens et permettre à tou·tes (habitant·es comme professionnel·les qui les accompagnent) d’en prendre conscience, de les valoriser et les renforcer ? Cela passe par se questionner sur quelle relation à la nature ont les habitant·es de ces quartiers.
  • Est-ce utile et fécond d’interroger les habitant·es sur leurs préoccupations plus éloignées de ces questions et de les inviter à faire des liens ?

Objectifs du stage

La mission de Marin Minard était de contribuer à enrichir la réflexion des praticien·nes impliqué·es dans le dispositif en la croisant avec les travaux existants et avec des données collectées auprès des publics concernés. En portant un intérêt aux courants de pratiques existants parmi les professionnel·les français·es et francophones et aux travaux de recherche liés, il devait conduire une démarche d’enquête auprès d’habitants des QPV de Niord, Poitiers, Limoges, Pau et Bordeaux, et produire des documents de synthèse de ses observations et analyses mettant en évidences ce qui fait sens pour les professionnel·les et habitant·es :

Comment et pourquoi des professionnel⸱les du travail social et de l’éducation à l’environnement abordent la biodiversité et l’écologie en quartiers prioritaires?

Résumé du rapport de stage de Marin Minard

Ce mémoire de recherche s’inscrit dans le cadre du explore les pratiques des professionnel·les du travail social et de l’éducation à l’environnement dans les quartiers prioritaires. Il interroge les raisons et les modalités de leur engagement pour sensibiliser les habitant·es des classes populaires à la biodiversité et à l’écologie.
La recherche s’appuie sur une enquête qualitative menée auprès de sept professionnel·les intervenant dans six quartiers prioritaires de la région Nouvelle-Aquitaine. À travers des entretiens biographiques et semi-directifs, ainsi que l’analyse des pratiques mises en œuvre, ce travail vise à comprendre les représentations, les discours et les actions des praticien·nes dans un contexte où les inégalités sociales et environnementales se croisent.
Le premier chapitre met en lumière la distance sociale, spatiale et symbolique entre les professionnel·les et leurs publics. Les enquêté·es, bien que souvent issu·es de milieux populaires, se distinguent par leur socialisation à l’écologie et leur adhésion aux codes de la culture légitime. Cette distance contribue à une vision misérabiliste des classes populaires, perçues comme démunies face aux enjeux écologiques. Les professionnel·les reconnaissent les inégalités environnementales, mais leur action reste orientée vers la responsabilisation individuelle des habitant·es, souvent au détriment d’une approche structurelle.
Le deuxième chapitre analyse les pratiques mises en œuvre, notamment l’utilisation des concepts d’« aller-vers » et de « pouvoir d’agir ». Ces notions, au cœur des discours des centres sociaux, visent à mobiliser les habitant·es et à les sensibiliser à la biodiversité. Les jardins partagés, présents dans la majorité des expérimentations, sont utilisés comme supports privilégiés pour croiser pratiques manuelles, savoirs naturalistes et culture vivrière. Cependant, ces pratiques révèlent des tensions entre la volonté de répondre aux besoins des publics et celle de les conformer à des normes écologiques dominantes.
Le troisième chapitre explore le rapport des professionnel·les au politique. Bien que leur action soit intrinsèquement politique, les enquêté·es expriment une mise à distance du terme, souvent réduit à la sphère institutionnelle et partisane. Cette ambivalence s’explique par leur position intermédiaire entre les classes populaires et les pouvoirs publics, ainsi que par leur dépendance aux financements publics. En outre, la recherche met en évidence la manière dont les pratiques des centres sociaux et des associations d’éducation à l’environnement participent à la diffusion d’une « écocitoyenneté » qui valorise les normes écologiques des classes dominantes tout en dépolitisant les inégalités environnementales.
Ce mémoire met en lumière les contradictions et les limites des pratiques de sensibilisation à la biodiversité dans les quartiers populaires. Il souligne la nécessité de repenser ces actions pour mieux prendre en compte les réalités sociales et les modes d’appréhension de l’écologie propres aux classes populaires. Enfin, il ouvre des pistes pour une réflexion sur la politisation de l’écologie populaire et sur les conditions d’émergence d’un discours écologiste radical au sein des centres sociaux et des associations.